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THE SEVEN MILE JOURNEY - "The Metamorphosis Project"



1-Theme for the Elthenbury Massacre.
2-The Catharsis Session.
3-Identity Journals (anonymous).
4-January 4th-The Hypothesis Hours.
5-A Sanctuary for Lugubrious Tracy.
6-Purification-The Journey Transcriptions.

Décidément les groupes purgés de chanteur courent les rues depuis quelques années, et The Seven Mile Journey fait partie de cette tripotée de groupes qui ont tous en commun d'accoucher d'albums chimériques tout en étant singulièrement différents les uns des autres. Au hasard des écoutes je tombe de plus en plus sur des formations qui ne comptent pas de voix dans leurs rangs, comme pour pousser la composition instrumentale jusqu'à son zénith. Mais alors que vont devenir les brailleurs et autres voix chatoyantes, je vous le demande. Pour l'heure je ne vais pas m'en plaindre, un peu de variété ça ouvre l'esprit. Avec The Seven Mile Journey, la musique existe pour elle-même, détachée des textes et de la langue, et cette formule sans chanteur fonctionne à merveille. Depuis la sortie de "The Metamorphosis project", le court et second album autoproduit du groupe (après "The Journey studies" en 2006, et une démo "The Seven Mile Journey" en 2001), les quatre danois commencent à se tailler une belle réputation via les concerts et le soutien de webzines centrés sur la musique alternative. Probablement du fait de la place centrale laissée aux instruments, le groupe réussit à créer des atmosphères abouties formant un tout élaboré qui ne lasse pas l'oreille, et pourtant la répétition est centrale dans ce cercle musical. Je pense aux groupes Stars of the Lid ou encore Godspeed you! Black Emperor qui jouent aussi sur ce même motif. S'inscrivant dans le genre "expérimental" The Seven Mile Journey apparait pourtant comme une étrangeté, un paradoxe en soi qui se sert volontairement et excessivement du schéma répétitif qui va à l'encontre de l'expérimental. La récidive est là, de façon systématique, comme celle qu'on trouve dans bon nombre de groupes comportant un chanteur.

Là où Dona Confuse fouille les possibilités et envoie les instruments en vadrouille, The Seven Mile Journey rallonge ses accords, qui aussi travaillés soient-ils, se répétent à l'infini. Les deux guitares ne font pas la même chose, mais elles déploient une symphonie régulière qui revient en leitmotiv constant dans lequel la répétition se fait vite sentir. L'une des guitares joue quasi systématiquement la même chose du début à la fin, elle s'acharne à utiliser les mêmes accords le plus longtemps possible. Dans tout l'album cette guitare s'occupe à la fois de la mélodie et de la rythmique tandis que la deuxième opère les variations qui s'imposent. Il y a quelque chose de singulier dans cette manière de superposer les instruments sur un fond sonore qui ne bouge pas d'un chouia de tout le morceau, mais heureusement pour nous ce fond sonore varie à chaque piste de l'album, sinon on en viendrait à se coller un revolver sur la tempe. Sans y faire attention, on répére donc très vite les notes qui seront démultipliées pendant tout le morceau, mais étrangement The Seven Mile Journey n'en devient pas insupportable, car cette guitare irritante n'en reste pas moins un atout dans la création de l'ambiance. On se laisse docilement emporter par cette piste facile à suivre, tout en appréciant les subtilités sonores des trois autres musiciens. A Sanctuary for Lugubrious Tracy et Identity Journals (anonymous) nous projettent une multitude de sons qui envoient l'esprit se balader du côté de la tourmente. The Catharsis Session n'a rien d'une ballade de santé, on fonce en aveugle sans avoir la moindre idée de l'endroit où l'on va atterir. La musique va t-elle se poser? ou continuer son étrange escapade, traçant de longues routes de ces notes allongées, défiant temps et patience tandis que dure notre état d'attente, "Et le refrain où se planque t-il?". On en vient à désirer l'apparition soudaine d'une note brutale, d'un riff de trop qui casserait cette machine bien huilée mais qui exhale une tension certaine. Pas un silence, pas un souffle n'entrecoupe ces lignes de notes qui n'en finissent pas. Les morceaux filent leur bout de chemin, sans bouleversements radicaux, comme pour nous dire que nous n'arriverons jamais au bout du voyage. C'est flagrant comme la répétition définit les morceaux, et pourtant je n'arrive pas à me lasser des pistes mystérieuses qui se déroulent devant moi. On se sent absorber par l'univers des danois, et mes oreilles frustrées par ses enchainés d'accords sempiternels ont du mal à décrocher pour regagner la surface. La musique file sereine et constante et il n'y a rien à redire. Identity Journals anonymous est le plus bel exemple de cette redondance aliénante qui n'en est pas moins hypnotique. La multitude des notes arrangées dans cette sphère répétitive est probablement ce qui fait que leur musique reste un véritable plaisir à écouter.


Charlotte Noailles.

EXOTIC ANIMAL PETTING ZOO - "I Have Made My Bed In Darkness"


1. Seeds 2. Anniversary Psalm 3. Hairdresser 4. A Balloon Enters Kyoto City 5. Moonshoes 6. Every Waking Moment 7. Richard Dean Anderson | One Is In Sheol, The Pit   8. a) Translations 9. b) Curse Of The Sands 10. These People Refuse To Believe That The Lake Is Bottomless 11. Ira Lore 12. Arendering


Dans la catégorie des OVNIS musicaux, il faudra désormais compter avec EAPZ. Sur leur album "I Have Made My Bed In Darkness", point de points (justement) de repères pour ceux qui ne se sont toujours pas mis à ce style dé-sty qu'est le métal expérimental. Et pour ceux qui s'y sont mis alors? Rassurez-vous: nos intéressés de Crown Point, Indiana, ne sont pas exempts d'influences. 


L'album s'ouvre sur "Seeds", dont le début nous plonge dans un univers clairement gothique, voir industriel, mais qui n'est pas l'univers global de cet opus. Le départ est foudroyant, et c'est juste après une courte introduction hurlée typique de la nouvelle scène métal hardcore Américaine que le groupe nous dévoile un autre aspect de sa personnalité. Nous sommes à la 2eme minute de cet album, et Exotic Animal Petting Zoo a déjà mis les choses au point. La voix exploite son falsetto, le jeu se fait plus fin, les guitares plus jazzy. Ca vous rappelle quelque chose? Psykup, ou encore Fantômas diront d'autres, toujours est-il que les accélérations ultra-violentes succèdent sans fin visible a des freinages Jazz, ou parfois Post-rock (a la Sigur Rós).  


Ce côté Sigur Rós justement, on le retrouve sur "A Balloon Enters Kyoto City", qui se révèle (après une intro dont le tout début n'est pas sans rappeler les Deftones) sous une forme un peu plus Dub certes, mais tout aussi planante. Cette chanson est un repos aérien bien mérité après le terrible "Hairdresser", cet océan de notes trébuchantes, de poussées dillingeresques, de changements de signatures de temps innombrables. Oui c'est vrai, on aura beaucoup d'occasions de penser a Psykup sur cet album, mais le groupe dépasse les Toulousains en cela qu'ils ajoutent sans complexe des éléments noise bien marqués (comme le démontrera un peu plus tard le magistral "Every Waking Moment"), ainsi que des petites touches southern rock. 


Le groupe fait aussi usage massif de voix parléà travers l'album, souvent modifiées pour sonner comme des transmissions radiophoniques (une coutume bien connue de la scène noise d'ailleurs). Sinon, la recette reste la même. On dira qu'ils n'ont rien inventé, et c'est absolument vrai. Les changements de styles à raison de 5-6 changements toutes les 8 secondes comme c'est parfois le cas ici, ces explosions musicales frénétiques rappellent bel et bien Fantômas. Ces parties Jazz funky sont également des marques de fabrique incontestables de bien de nouveaux groupes comme Capillary Action, ou de moins nouveaux comme les grands du mathrock Don Caballero. Les virées metalcore évoquent, elles, un énième émule de Dillinger Escape Plan. C'est la loi de la jungle: le premier arrivé est le premier servi. Mais tout cela est malgré tout vraiment très très bien ficelé. Ce n'est pas nouveau, mais c'est du bon. Et cela reste une approche très originale que seule une toute petite minorité de musiciens adopte autant à fond. Et aller, parce qu'il faut quand même le dire, ce groupe à vraiment le don de s'approprier la musique pleinement, aussi ne pensera-t-on pas au plagiat pendant l'écoute, mais bien à l'inspiration. S'il fallait prendre une image, on pourrait dire que le genre dans lequel opère (entre autres) Exotic Animal Petting Zoo est à la musique ce que la récente "fusion food" est à la gastronomie. 


Mais finalement, ce que proposent nos intéressés, c'est bel et bien de caresser des animaux exotiques, non? Reste à savoir combien de temps le monde mettra pour s'accoutumer à ces safaris que de plus en plus d'agences s'emploient à proposer...

To The VANISHING Point - "This is where it all began"



1-Crows
2-Voices
3-Blinded
4-Anyway
5-The monsters hiding under my bed
6-Headache
7-What's the point of sleeping anyway?
8-The quiet son
9-The ride
10-To the vanishing point
11-Rid of you


Un peu de douceur pour changer. Réjouissez-vous! Au delà de toute violence, l'album de To the VANISHING point propose ce que la mystique musicale a de plus profond et de plus mystérieux, un voyage intérieur en dehors des sentiers battus. A l'écoute de l'album, la plongée en soi se fait tout en douceur, en aveugle et sans repère, laissant la belle part au hasard.

Comme soucieux de ne pas abîmer les parois de notre âme, To the VANISHING point nous emporte et cela sans l'aide de riffs dynamiques, le charme s'opèrant autrement, tout en finesse et en pudeur. Et pour les curieux qui se demandent quel sens obscur contient le nom du groupe, on appelle the vanishing point le point au-delà duquel quelque chose disparaît ou cesse d'exister. Bon, ça reste un chouia obscur, mais avec un nom pareil on sait à quoi s'attendre quant au style du groupe. Avec leur premier album, "This is where it all began", les quatre suisses produisent un son résolument post-rock d'une rare subtilité. L'émotion intimiste qui s'en dégage est un langage intermédiaire entre méditation et rêverie, entre éveil et sommeil.

Un petit retour en arrière s'impose: le premier né de To the VANISHING point sort en Suisse en avril 2005 sous le label Saïko records et dans un premier temps c'est dans leur pays de formation que le groupe enchaîne les concerts. Par la suite, ils jouent dans bon nombre de festivals, encore la meilleure façon de se faire un nom parmi les groupes de la scène internationale. L'expérience porte ses fruits puisque la bonne accroche avec le public et les ventes prometteuses du groupe rencontrent l'enthousiasme du label français Jerkov qui sort l'album chez nous en février 2006. Le groupe commence à se faire remarquer, mais comme pour se départir d'une partie de leur mérite les membres du groupes, Jeff (chant, guitare, piano), Pol (guitare), Gunt (basse) et Steve (batterie) affirment franchement leurs influences, il s'agit de quelques uns des grands noms du post rock. On y trouve entres autres Sigur Ros, Mogwaï, Radiohead, mais aussi des groupes pêchus comme Neurosis ou encore Deftones et bien sûr des références électro avec M83 et DJ Shadow. L'électro a une place fondamentale dans l'univers du groupe, qui mélangé à l'accoustique donne à To the VANISHING point le charme d'une musique posée à savourer sans vergogne. Ici, il ne s'agit pas de faire gigoter à tout rompre les murs de la baraque, ni de bouger rythmiquement la tête, l'heure est à l'écoute dans sa plus simple définition. Dans Headache, la voix est aux murmures tandis que les instruments semblent marquer le tic tac d'une vieille horloge, qui en "trompe-l'oeil", est un écho à l'électro pourtant bien actuel, une sorte de nostalgie viscérale modelée avec les instruments d'aujourd'hui.

Le groupe pose une musique d'ambiance, une mélancolie vis à vis de quelque chose d'indiscernable hormis l'évidence d'une aspiration au calme et à la disparition du mal intime, et de la culpabilité, It's not your fault (What's the point of sleeping anyway?). La multitude des thèmes évoqués dépassent bien sûr ce bref aperçu non-exhaustif de ce que le groupe cherche à transmettre, et c'est à chacun de se faire une idée de cet étrange univers. Alors comment expliquer que les morceaux semblent avoir été composés personnellement pour nous, pour la chambre intime et propre à chacun que nous occupons le soir lorsque la mélancolie commence à poindre et que le vide pèse sur nos pensées. To The Vanishing Point s'approprie notre lieu, siège de nos plus mélancoliques réflexions, leur musique comme support sur lequel on se laisse agréablement dériver. Les humeurs mélancoliques du groupe font plus particulièrement de Crows, Blinded, The tide, les représentants d'une épuration absolue de toute superficialité. La pesée ne vaut rien, l'envol est immédiat.

A aucun instant l'éveil ne semble s'annoncer, si ce n'est dans The tide quand des coups successifs de batterie nous rouvrent les yeux sur l'échappée parcourue. Et serait-ce par souci de réveiller nos caboches que l'album est entrecoupé des pistes 4 (Anyway) et 8 (The quiet son), morceaux qui se révèlent énergiques comparés au reste de l'album? Remarque à part, pas d'inquiétude à avoir sur le talent du groupe, leur premier album n'a rien d'assoupissant. Leur bébé a toutes les qualités du petit génie, certes plutôt doux et triste mais qui n'a pas besoin de se plonger dans un bon Spleen de temps en temps? Rien de dépressif à l'outrance, rien que de la bonne bile noire rock'n'glide.

To The Vanishing Point - This Is Where It All Began


Charlotte Noailles.

DROWNING POOL - "Sinner"




1-Sinner
2-Bodies
3-Tear Away
4-All Over me
5-Reminded
6-Pity
7-Mute
8-I Am
9-Follow
10-Told You So
11-Sermon







Si "Full Circle" le dernier album du groupe m'a laissé de marbre, la faute à mes écoutilles qui ne digèrent pas le changement de chanteur, en revanche pas question de s'endormir à l'écoute de "Sinner" avec lequel Drowning Pool nous a offert une dérouillée de qualité en 2001. Sans abattre de méchanceté gratuite, le groupe se résume pour moi à ce seul album qui condense tout ce que j'attends d'un groupe de metal, à savoir de m'offrir des enchaînés de rage et une pluie d'instruments plus que motivés d'en découdre, le tout accompagné de cris mixés de douceur. Les attaques envers ce style de musique n'ont pas fini de pleuvoir, auxquels j'aime régulièrement me joindre, car en amatrice de gros son, épais et rageur je n'en suis pas moins intolérante envers les groupes bourrins qui se résument à gueuler et à faire péter les instrus. On se situe donc la limite qui détache "Sinner" de ce genre là? En affiliant Drowning Pool au nu metal il est déjà plus facile de s'y retrouver, sous entendant également une variété certaine et des compositions peauffinées au poil. Tous les morceaux de l'album sont détonants, proposant un couplage de voix entre celle de Dave Williams et des autres musicos (instrumentales ou vocales), comme dans Sermon par exemple. Le ton est à l'agressivité que la douceur vient prendre en relais au cours des morceaux, Pity, Sinner, Mute... Quant aux intruments du groupe, on les ressent tous avec la même puissance, aucun n'étant perdu dans un ensemble gras ou brouillon, l'harmonie instrumentale est complète.
La tonalité d'ensemble offre un ton dense et polyvalent dans lequel la débauche d'énergie se couple au souffle rauque du chanteur. Dans le top 5 de l'album, il a bien évidemment I Am morceau qui débute avec la basse, celle-ci marquant le début d'une ballade olfactive aux rythmiques enflammées. L'ensemble des pistes est une véritable invitation à la découverte, avec des variations originales et multiples, comme dans Follow ou le début de Bodies, dans lesquelles les solos de guitare offrent un moment d'accalmie avant le retour au furieux au head banging, au cri éraillé. Le nu metal réaffirme ces ambitions, celles d'offrir une travail à la fois brutal et recherché au genre metal. Quand All over explose en rage, Mute jouera davantage la carte de la douceur avec en arrière fond des instruments plus discrets et des arpèges fluides derrière la voix caverneuse de Dave Williams. Le son est riche, polyvalent, envoyant valsé l'éternel intro/couplet/refrain des groupes qui ont fait la gloire du metal. Les introductions furieuses, comme celle de Told you so, ne s'offrent à nos oreilles que durant un tant limite, proposant à leur suite un plein d'accords variés qui annihilent la redondance et les répétitions faciles. Le son est élaboré à la perfection, au point que l'introduction saturée de Tear Away ne cafouille pas, les notes s'espaçant suffisamment pour instaurer une atmosphère metal sans donner l'impression d'une horrible bouillie. La voix calmée et adoucit, Dave Williams se joint aux incroyables solos des guitares, l'euphonie est atteinte et le groupe nous offre avec "Sinner" l'un des meilleurs albums de nu metal. Sous de nombreux aspects, Drowning Pool rejoint ainsi Mudvayne pour son côté polyvalent et massif, sans offrir une pâle copie du groupe (les deux groupes sont nés quasiment à la même période, avec en 2000 le premier album de Mudvayne, "L.D.50"). "Sinner" est un album culte, et qui le restera, prisonnier de ce statut dont il ne peut se dégager. Le groupe ne sortira malheureusment plus d'album avec Dave Williams au chant (un des atouts majeurs du groupe), celui-ci étant décédé en 2002. Le groupe continue son chemin, désormais trois albums au compteur, mais "Sinner" restera celui pour lequel on se souviendra de Drowning Pool.

Charlotte Noailles.