||| Chroniques Et News De Tous Styles Musicaux |||


NEWS: Collective Anthem sur Twitter!


Bongiorno tout le monde,

Pour tous les "Web 2.0-autes" qui lisent ce blog, vous serez heureux d'apprendre qu'il est maintenant possible de suivre les articles de Collective Anthem directement sur Twitter! :)


Et puis, "Followez"-nous comme on dit...si vous avez un compte Twitter bien sur. Sinon, vous avez maintenant une excellente raison de plus de vous y mettre hehe

Je sais que ca simplifiera la vie de pas mal d'entre vous ;-)

A+ tard pour de nouvelles aventures, les loulous!

Thibs

NEWS: Interview de Naïve


1) To Lose and to die for, 2) Underwater, 3) The Crying Community, 4) The Shroud, 5) Your Own Princess, 6) Everything dies, 7) The End.


Un mois après la sortie de « The End », premier album du groupe toulousain Naïve, Jouch, Mox et Rico reviennent sur le parcours du groupe pour nous faire partager le spleen envoutant de leur univers trip-hop/electro/metal. Pour les chanceux qui ont assisté à leur Live au « Complot sur le Campus » ou encore au Bikini, c'est l'occasion de s'y replonger, pour les autres « Ne faites pas l'impasse! c'est l'une des meilleurs sorties de 2009 ». Bonne lecture, et je l'espère bonne écoute!

Messieurs, une fois n'est pas coutume, ma première question ne va pas être très originale. Alors, d'où vient le choix de Naïve comme nom de groupe? C'est un hommage au label du même nom, ou simplement pour la symbolique de sa définition, à savoir « spontanée, sincère, vraie, naturelle, mais aussi crédule ». Est-ce qu'il faut y voir un rapport avec la conjoncture actuelle, comme de dire que malgré la crise du disque on peut encore faire de la musique et la cristalliser sur un support alors qu'en général la plupart des groupes n'arrivent à rien sans label.

Ta définition colle énormément au contexte de crise actuel, et la définition du mot "naïve" est également extrêmement intéressante... Nous aimons l'idée d'appréhender la musique de manière naïve dans le sens noble du terme, c'est à dire de manière directe et ressentie, donc au final de manière plus sincère. En choisissant ce nom, il était surtout question d'assumer quelque chose de très naturel et premier degré, encore une fois dans le bon sens du terme. Accepter d'être touché par une mélodie ou des mots simples. Ne pas chercher le calcul, aller à l'essentiel. Le côté féminin du mot et la prononciation identique en anglais et en français nous plaisait également beaucoup. On aime énormément le contraste entre la douceur du nom et l'énergie dégagée par la musique. Concernant le label Naïve, aucun rapport, même si nous le connaissons évidemment. Cela dit, si ils sont intéressés, nous également!

A peine un peu plus d'un an depuis le premier concert du groupe, et voilà venir le premier album et un DVD. C'est fou d'avoir rallier autant de personnes à la cause Naïve en si peu de temps, à savoir que ce sont les pré-commandes en ligne qui ont permis le pressage de « The End ». Pensez-vous que la postérité de Mary Slut, Agora Fidelio, Kalevala et le suivi de vos parcours aient joué, que les gens se soient dit, « Tiens un side-project! Écoutons pour voir ». Car finalement il y a eu peu de concerts, trois je crois. En gros, les gens vous ont découvert comment? La scène toulousaine étant très active, j'imagine que Naïve a bénéficié d'un gros coup de buzz interne.

Concernant le DVD, nous avons simplement eu l'opportunité de récupérer du matériel vidéo et son de très bonne qualité, après un concert ou on s'était vraiment fait plaisir, donc il nous est apparu comme naturel de proposer en nombre assez limité à ceux qui seraient intéressés de se procurer des images « souvenirs » de la soirée et de quelques moments persos en répétition par exemple.
Sortir un album et un DVD d'un coup peut paraître précipité, mais comme nous te le disions précédemment, le DVD était plus un plaisir qu'un coup marketing.
En termes de « buzz » pur, il faut avouer qu'internet nous a été d'une grande aide. Nous avons passé énormément de temps à promouvoir le groupe et sa musique sur myspace et facebook en particulier, et nous continuons autant que possible, dans la mesure ou aujourd'hui, en tant que groupe autoproduit, le net reste le premier moyen de visibilité et d'actu. Nous avons pour l'instant effectivement peu de concerts à notre actif, mais après ces quelques dates, les retours ont été très positifs et nous pensons que le bouche à oreille a aussi fait son effet.
A priori, nous pensons avoir eu assez de facilité à faire nos preuves de part nos diverses expériences scéniques passées, au travers de nos autres groupes, tournées et autres, en particulier lors du concert au Bikini que peut être certains groupes plus « jeunes » n'auraient pas assumé.
Tant qu'à y être, il est important pour nous de remercier chaleureusement ceux qui nous aident, à commencer par nos vieux potes de Sidilarsen (soutenez les bordel, et si vous ne connaissez pas encore, dépêchez vous de vous y mettre!!), qui nous ont proposé d'ouvrir pour eux lors de la sortie de leur dernier album « Une Nuit Pour Sept Jours » dans ce même Bikini. Cette soirée nous a vraiment marqué, et nous espérons vraiment partager d'autres dates... My Own Private Alaska et Eryn Non Dae (ex-END.) ont également une place spéciale dans nos coeurs pour tout le soutien qu'ils nous ont apporté depuis le début de l'aventure.

Et vous avez fait fort! Difficile de ne pas apprécier une sortie qui coïncide avec la Fête de la Musique. Coup de maître ou pur hasard?

Les deux mon capitaine!

A l'écoute de « The End » on ressent immédiatement les effets envoutants de la rythmique, une rythmique nourrie de trip-hop, de samples electro et de metal. Joli cocktail, tout est parfaitement calé. Le tout donne une combinaison efficace qui évoque les grands espaces, le ciel, la mer, une ambiance intimiste et mélancolique. On pense à Team Sleep, Deftones, Tricky, Massive Attack, Morcheeba, The Aloof, mais vos influences viennent peut-être de contrées complètement différentes.

Avant tout, merci beaucoup pour cette question et pour ton sentiment vis à vis de notre musique. Les influences que tu cites sont très pertinentes! Nous avons tous les trois des influences très diverses et extrêmement éclectiques. Ca peut aller de choses très violentes à des choses très calmes, de la musique organique autant que synthétique, concrètement tout ce qui nous touche et quel qu'en soit le style. Au final on puise nos influences au fond de nous mêmes et de ce que nous tirons de ce mélange.

Le morceau Everything dies m'évoque la série Six Feet Under dont le coffret de la cinquième et dernière saison affiche: « Everything, Everyone, Everywhere, Ends ». On en voudrait un peu plus, mais le chemin s'arrête là. Il semble que le morceau nous invite à profiter de chaque instant derrière la facette nostalgique du temps qui passe. Comme si le spleen et carpe diem avaient fini par trouver un terrain d'entente. Quand vous avez composé ce morceau le ressenti penchait plutôt de quel côté?

En réalité nous n'avons aucun processus de composition particulier, aucune méthode de prédilection. La manière de composer parle d'elle même, est très instinctive, et représente la manière "naïve" d'être du groupe. On y retrouve donc en quelque sorte le lien avec ton évocation du "Carpe Diem". Pour exemple, la ligne de voix d'Everything Dies avec son effet "téléphone" a été enregistrée en une seule et unique prise, improvisée, sans même savoir avant ce qu'elle allait être... On ne se pose pas de questions, on avance et on avise... Le texte de ce morceau est né pendant une période finalement très éloignée de ce bon vieux Carpe Diem, et plutôt fataliste. Si on devait nommer une ligne de conduite chez Naïve, ça pourrait être Spleen = paroles et Carpe Diem = musique. Encore une fois on retombe dans le côté naïf de la chose, l'instinct et la spontanéité.

On vous l'a forcément déjà demandé mais pourquoi avoir choisi « The End » comme titre pour votre premier album? Pour boucler la boucle? « The End » s'achevant par le morceau The End et recommençant éternellement son leitmotiv rythmique... Dans ce sens, on pourrait y voir l'image d'une renaissance perpétuelle. C'était le but?

L’ album a été produit maison avec les moyens du bord, soit pas grand chose. On a chacun traversé des temps difficiles pour diverses raisons persos durant sa mise en oeuvre. Concernant Mox de gros problèmes auditifs suite à un choc il y a six mois qu'il traîne aujourd’hui encore plus ou moins… On a tous souffert dans cette histoire… ça nous a beaucoup handicapé et retardé. Mais on y est arrivé !!
Tout ceci, a donc un moment remis en question l’existence de Naïve et autant te dire que cet album a été accouché dans la douleur…
Aujourd’hui on sort enfin la tête de l’eau, et on est surmotivé !!! Puis comme on dit ici : The End Is The Beginning… !!! On est d’ailleurs déjà en route pour la suite… Une chose est sûre, on ne regrette absolument rien et on est bien plus qu’heureux et soulagé d’avoir pu terminer notre 1er album, et surtout de pouvoir continuer...
Pour ce qui est du titre, une fois de plus la naïveté a refait surface et après moultes réflexions et recherches, il s'est imposé spontanément. On avait d'abord décidé d'appeler l'album "Everything Dies" mais le sens nous a finalement paru trop définitif et radical. Dans "The End", on retrouve également le côté pesant et lourd, mais une porte reste ouverte, on peut y voir des tonnes de choses. Il était temps de clôturer "l'histoire", mais une fin n'est pas forcément négative, elle permet aussi parfois de partir vers autre chose, une sorte de renaissance comme tu le disais.

Indépendamment de la musique, les paroles créent à elles-seules un univers nourri de « spleen». J'imagine que le choix du chant clair et souvent murmuré vise justement à focaliser l'attention sur les mots.

Justement pas. Nous avions l'envie de ne pas "effrayer" les personnes peu habituées à écouter du metal "traditionnel" emmené à grands renforts de cris et autres voix agressives, tout en leur glissant gentiment quelques riffs burnés; ce n'est en rien un autre choix marketing, mais nous aimons l'idée de pouvoir faire une musique dite metal tout en y alliant de la douceur, et par là même toucher un public plus large.
Cela dit, en gros, sur un morceau de 9 minutes on a à peu près 30 secondes de chant, parce qu'avant tout nous souhaitons privilégier la musique, avec le chant plutôt vu comme un instrument.
Nous voyons notre musique comme un tout, et pas comme une chose sur laquelle est posée un chant qui se doit d'être mis en avant.
En revanche cela ne signifie pas que les mots n'ont aucune importance et il paraissait évident de les rendre compréhensible pour les personnes intéressées. Donc il était nécessaire de les imprimer dans le digipak. Dont acte.

Et vous écrivez les textes ensemble? Comment ça se passe?

Jouch : Je suis le seul à m'occuper des paroles jusqu'ici. Je ramène les textes, j'explique en gros ce que j'ai voulu mettre dedans, et Mox et Rico valident ou non.
Souvent j'écris des choses que je garde très longtemps de côté le temps de m'habituer, de réfléchir à ce que j'aime ou que je n'aime plus, et ce n'est que plus tard que je ressens le besoin de mettre en avant tel ou tel texte avec tel ou tel thème, le tout sur telle ou telle musique.

Grâce au soutien du collectif Antistatic votre album est maintenant disponible via leur boutique, mais que font les labels? Est-ce qu'une piste se profile à l'horizon?

Concernant la boutique Antistatic, l'album y est en vente depuis une semaine.
Au niveau des labels, les démarches sont en cours. Nous avons contracté un deal de distribution numérique et l'intégralité du disque sera début Août disponible sur la majorité des plateformes de téléchargement légal (Fnac, Virgin, iTunes, etc...). Ce téléchargement sera possible soit directement sur les sites précités, soit via un player sur notre page myspace http://www.myspace.com/wearenaive ainsi que sur le facebook du groupe. Bien entendu, notre but à plus ou moins long terme est d'avoir un label et d'être distribué.

Des dates sont à prévoir prochainement? Mox j'espère que tes oreilles sont rétablies et prêtes à repartir fissa dans les salles. Nous sommes une sacrée tripotée de gens à vouloir écouter la totalité de « The End » en Live.

Actuellement nous n'avons pas de dates concrètement arrêtées mais plusieurs à valider. Si la santé de Mox le permet, nous aimerions reprendre la scène aux alentours de l'Automne. D'ailleurs à ce jour l'évolution de son rétablissement est plus que positive!
Rassure toi, nous trois aussi sommes impatients de jouer l'intégralité de "The End" sur scène, et nous ferons tout pour le faire dans le plus de villes possible!
Nous tenons en tout cas à outreremercier une fois de plus tous ceux qui nous soutiennent, nous écoutent, ont acheté et achèteront l'album, nous n'oublions pas que c'est grâce à eux que nous avons pu le presser!
Et enfin un merci tout particulier et spécial à toi pour cette interview et pour tes questions perspicaces.
Vu que tu ne nous demandes pas de mot de la fin, nous allons bien évidemment nous permettre de te l'imposer, et ce mot de la fin sera : Complèt'ment.

Je vous remercie également! J'ai été ravie de vous proposer ces questions. A très bientôt! Naïve triomphera!

Charlotte Noailles.

Photographie: Flora Riffet c/o WildEyed Photography.
De gauche à droite: Jouch (chant/guitare/prog), Mox (batterie, prog) et Rico (basse).

KEHLVIN - "Holy Cancer"


1. Le Barnacle (Love Will Never Be Enough) 2. Untitled 3. God As A Mere Intentional Object 4. Untitled 5. Atheist Hope 6. Untitled



Vous connaissez tous Converge, Time to Burn ou encore Envy, les grands costauds de la scène hardcore internationale, et voilà qu'en 2006 Kehlvin débarque de la Suisse avec son premier album « The Mountain Daylight Time » et ajoute son nom à la généalogie des brutes épaisses. Appuyé par Division Records, le groupe enchaîne les projets: en 2008 les suisses ont enregistré « Ascension » avec Rorcal, ainsi qu'un EP de trois morceaux (découpé en six pistes). Cette petite galette intitulée « Holy Cancer » est accompagnée d'un DVD Live 2006-2007 qui fait plaisir aux yeux comme aux oreilles. Avec cette sortie, Zen (batterie), Yonni (chant), Baptiste (basse), Spieli et Fabien (guitares) reviennent pimenter le hardcore à l'aide d'un sludge massif. Le sludge... Qu'est-ce que cette chose-là? Allez, on pose le skeud sur la platine et on se débouche les oreilles sans tarder avec cette mixture sonore et boueuse (traduction de sludgy).

Grâce à des ambiances lourdes inspirées de ce style musical né au début des années 1990 en Nouvelle-Orléans, et du post-hardcore, Kehlvin revient pour mettre la pagaille dans les chaumières. On définit le sludge comme la fusion du doom metal et du hardcore dont Kehlvin utilise ici les caractéristiques respectives. Du doom, le groupe a conservé les atmosphères rugueuses et puissantes (Le Barnacle (Love Will Never Be Enough), un tempo lent, ainsi qu'un goût prononcé pour les morceaux-fleuves (piste 1: 12min02, piste 5: 10 min58) et l'instrumental (piste 2, piste 4, et Atheist Hope = piste 6). Du hardcore, Kehlvin conserve la voix menaçante et saturée. Seul la piste 6 nous laisse entendre une voix enregistrée en chant clair. Excepté ce morceau, le reste de l'EP est habité par la gueulante. Dès le premier morceau, Le Barnacle, Kehlvin délivre ses cris via un Yonni qui livre toute sa puissance au milieu d'une explosion de cordes dévouées à la distorsion. Attention, ça déboîte, jusqu'à ce que des virées instrumentales musèlent plus que de coutume la gueule béante de Yonni, lequel ne fait aucune infidélité au screamo tout l'EP durant. Sombre, brute, les pistes 3 et 5 beuglent en tous sens tandis que le tempo se fait étrangement lent pour un groupe de hardcore. A contrario, on retrouve des influences plus primitives avec la piste 3, God As A Mere Intentional Object. Tendez la main sans peur car les hurlements se font souvent la malle. Le groupe n'a rien d'un agneau mais l'instrumental est si présent qu'on en oublie souvent la voix qui s'est tue après les passages rageurs. Les structures progressives brisent le modèle couplet-refrain et nous accorde ainsi quelques pauses bien méritées. Pour digérer le tout, les guitares nous transportent loin des tranchées du head-banging pour un univers séraphique et soigneusement cadencé.

« Holy Cancer » c'est donc beaucoup d'accalmies inattendues et de retours brutaux au chaos. Avec Kehlvin, c'est tout l'un ou tout l'autre, comme de passer brusquement de l'eau chaude à l'eau glacée. En résumé, ça surprend, ça beugle, ça ferme sa gueule, et ça s'énerve avant de revenir au lyrique. Le morceau Atheist Hope débute par des guitares voluptueuses et circulaires dans un tout sans voix qui donne l'impression d'écouter du Explosions In The Sky (rock indie), puis les guitares pesantes et apocalyptiques reviennent violemment avec un Yonni plus saturé que jamais. On retrouve un bel exemple de doom dans cette même piste 6 avec une batterie extrêmement lente et metallique. Une batterie aliénée sur laquelle Zen donne inlassablement les mêmes coups de cymbales.

Kehlvin est un groupe franc de la baffe qui propose aussi de belles poussées nostalgiques et instrumentales. A découvrir pour tous les amateurs de Cult Of Luna, Neurosis, Forceed, Isis et j'en passe.

Charlotte Noailles.

IMPURE WILHELMINA - "Prayers And Arsons"



1. Continental Breed, 2. Hide Your Anger, Give Your Mounth, 3. Poisons And Blandes, 4. The End Within, 5. Travel With The Night, 6. As We Kneel, 7. Cover Me With Kindness, 8. The Rope, 9. Drift

Si certains groupes perdent de leur saveur les albums passant, Impure Wilhelmina est encore loin de connaître le même sort. Sortie en 2008, la dernière galette intitulée « Prayers and Arsons » (« Prières et Incendies ») démontre qu'avec l'âge (le groupe existe depuis 1996) le son des quatre Suisses ne cesse de se bonifier. Après un EP et trois autres albums (Afraid en 2000, I Can't Believe I Was Born in July en 2003, L'Amour, La Mort, l'Enfance Perdue en 2005) « Prayers and Arsons » nous balance neuf nouveaux titres à savourer.

Le son chargé d'une mixture hardcore mêle le chant clair à son jumeau contraire, « screams screams! » sur un schéma mélodieux et soigné. Les arpèges subtils et incessants séparent définitivement Impure Wilhelmina des autres brutes du hardcore. La mélodie n'a jamais été aussi présente dans un groupe originellement taillé pour la cogne. Des nuages saupoudrés d'une suie épaisse. S'il y a bien un groupe de la scène hardcore qui fasse penser au clair-obscur c'est bien Impure Wilhelmina. Loin d'être le seul groupe de la lignée hardcore à incorporer avec soin la mélodie dans ses compositions, il est pourtant l'un des seuls qui s'autorise à explorer aléatoirement l'obscurité et la lumière, empêchant une classification mono-bloc de leur son. Tout comme Asidefromaday, Impure Wilhelmina propose un voyage dans les profondeurs avec une flopée de passages mélodieux dans les artères et le sombre comme arrière-plan, à la différence qu'Impure Wilhelmina laisse une place importante aux arpèges qui semblent être des rayons de lumière dans la tourmente. L'effet rendu est qu'on ne sait pas clairement où l'on va. Le premier titre, Continental Breed, est le passe-partout de l'album avec un chant clair qui nous fait tranquillement entrer dans une spirale bien huilée de guitares passées maîtres dans l'art de la virtuosité. Plutôt posé par rapport aux autres morceaux Continental Breed a l'avantage de démontrer le niveau musical du groupe.

L'inhabituel avec Impure Wilhelmina se trouve dans l'alliance d'arpèges harmonieux avec un hardcore mutant. Avec le deuxième morceau Hide your anger, give your mouth ça attaque sec et le groupe met tout sans dessus dessous pour notre plus grande surprise. On ne s'y attendait pas, puis au milieu du carnage une ballade pointe son nez avec un chant clair, une batterie adoucie et des accords à la Sunny Day Real Estate. Avec Drift on observe la symbiose entre des accords de post-rock (// avec To THE Vanishing Point ou Zero Absolu) ou même viscéralement rock (Matchbook Romance, Ghinzu) et des bêtes plus franches du collier comme Rorcal, Pain, Kehlvin, etc. Après le début mélodieux de Cover me with kindness on entend soudain une gratte typiquement death (Gojira es-tu là?) appuyé d'un solo aigu qui accélère le pouls et fait monter le son en puissance. Une belle dérouillée puis retour dans la zone douceur. Avec « Prayers and Arsons » la distortion n'est pas automatique, merci les gars! On évite ainsi l'album brouillon et 100% cru. On sent un véritable travail sur le son avec Drift et son chant clair dans un morceau entre l'apocalypse et une ambiance doom. Quant à The End Within le début fait clairement penser à Bohren § Der Club of Gore (doom), avec une once de pêche en plus et un screamo feutré en bonus. De nouveau on retrouve les arpèges en son clair tandis qu'une guitare plus grave fait de la répétition son leitmotiv. La batterie contenue empêche les autres instruments de s'emballer jusqu'à ce que Michael (chant) opte pour une voix saturée qui leur relâche la bride sans pour autant abandonner les mélodies aériennes qui se tissent en fond. Poisons and blades a tout de l'ambiance de Pillar de Sunny Day Real Estate mais lorsque Michael viendra se joindre à la partie on retrouvera les élans hardcore d'un As we kneel ou Hide your anger, give your mouth.

Pour conclure, Impure Wilhelmina, ce n'est pas du death, ni du doom, ni du metal post-hardcore mais un habile assemblage d'humeurs calmes et furieuses. Il est temps de donner à ce groupe toute la renommée qu'il mérite. « Prayers and Arsons », un album sous les bombes et dans les cieux.

Charlotte Noailles.

MY OWN PRIVATE ALASKA - "EP"



1. Die For Me (If I Say Please), 2. Page Of A Dictionary, 3. Ego Zero, 4. Kill Me Twice, 5. I Am An Island 6. First Steps


M.O.P.A, « Three sitting guys » ou la quintessence d'un groupe en pleine introspection avec Yohan à la batterie (Aeria Microcosme), Milka au chant (Agora Fidelio, Psykup) et le mystérieux T au piano. En mai dernier, le label Division Records a sorti la reissue de l'EP de 2007, l'occasion pour les retardataires de se procurer leurs morceaux à la croisée du screamo et de la musique classique. Tout un univers visuel et émotionnel à découvrir sans tarder. Pour l'actualité, M.O.P.A peaufine actuellement son premier album.

Indépendamment de sa formation peu courante: voix/piano/batterie, l'un des attraits majeurs de M.O.P.A est de proposer une ambivalence entre la beauté classique et un hardcore lyrique (on peut penser à Asidefromaday ou encore Impure Wilhelmina qui utilisent également un chant screamo). Cette alliance étonnante a donné naissance à des morceaux de l'entre-deux, sur deux tonalités distinctes mais complémentaires. Durant les concerts, la distance entre le public et les musiciens (tous trois assis) fait d'ailleurs partie de la mise en scène, comme s'ils ne nous étaient pas violemment offerts à la dégustation mais dévoilés avec une certaine réserve. Voyage à travers six titres marqués par un intime exprimé en un duo des contraires (cris et virtuosité classique). Avec ces trois-là nous sommes loin de la musique doucereuse qu'on écoute les pantoufles aux pieds ou passivement installé dans un fauteuil, mais à ciel ouvert, la peau écorchée et l'introspection en étendard.

Un piano, une batterie et une voix à des lieux de la sérénité. Quelque chose entre un Aaron monstrueux et un Chopin couplé à la créature Will Haven. L'EP débute par Die for me (If I say please) en un sublime duo piano/batterie avant que Milka n'entame une demande de pardon et parle du faible espoir d'une réciprocité, Would you die for me? Would you sacrifice? On the second day I'll bring you flowers. Une conquête entre deux êtres avant la déception annoncée. Cette voix a de la gueule, aspire, expire et éjecte des volets de sons éraillés et sauvages. Doucement et plus ou moins tempérés, les mots s'effilochent au fil des textes pour augmenter la tension de l'âme torturée. Au milieu du champ de bataille des sens et des sentiments, l'image de l'Alaska nous enfonce davantage dans l'intime, comme une plongée dans le froid brutal de la sauvage nature. Il y a le risque de fuir à l'écoute de la voix saturée, la musique restera alors opaque, un bloc d'obscurité alors que le piano et la batterie valent à eux-seuls leur pesant d'émotions. Dans Kill me twice le contraste est particulièrement fort entre la voix et une fugue limpide à la Chopin, une traversée douce et mélodique que suivra une accalmie vocale ainsi que plusieurs passages en chant clair, ovnis dans un EP qui n'en contient pas. Les reproches pleuvent à mesure que le morceau progresse. You were supposed to love me, You were supposed to play a part, You were supposed to talk, to reinvent, to kiss or kill. Il est l'un des sommets de l'EP, à l'image des paysages vertigineux et des gouffres de l'Alaska.

Pour ne rien gâcher, les compositions au piano sont magnifiques, avis aux amateurs de Chopin, de Bach ou plus largement de Yann Tiersen (voir Comptine d'un autre été) qui ne pourront qu'apprécier les compositions fluides de T. Le piano qui reste un instrument catégorisé « classique » ne dément pas ses origines avec M.O.P.A et nous rapproche des BO de films aux ambiances solennelles et spirituelles qui jouent pour beaucoup dans l'appréciation d'un long-métrage. On pense à Philip Glass ou à Danny Elfman (une des influences déclarées de M.O.P.A) mais comme le trio ne fait pas dans le plagiat (je sortirais bien le nom du groupe qui pompe tous les riffs d'untel, mais non) M.O.P.A ne se contente pas d'ambiances, mais traite des deux moyens d'exprimer un sentiment: de façon délicate (piano et batterie) et violente (chant). « Le fabuleux destin d'Amélie Poulain » résonne dans nos mémoires grâce à Yann Tiersen et ses douces ballades, alors qu'avec M.O.P.A l'angoisse est omniprésente et le film « My Own Private Idaho » (de Gus Van Sant) change de lieu pour une fouillée dans les cordes graves et souffrantes de Milka. Pourquoi cette symbiose étrange entre un chant hurlé, une batterie doom et aérienne, et un instrument aussi classique que le piano? Pour échapper à la facilité peut-être, pour sortir du lot? Sûrement (qui n'en rêve pas?). Tout est fait pour focaliser notre attention sur les mots. Alors, ça parle de quoi?

Via un processus vieux comme le monde, l'EP apparaît comme une catharsis pour le trio. La tragédie à la M.O.P.A ressemble à des mots mis à mal qui mettent la souffrance sur le devant de la scène en la disséquant. Trois interprétations différentes: par le langage (tous les textes sont en anglais), un tempo aérien et la mélodie classique du piano. Quant au pourquoi d'une voix éraillée couplée à la beauté de compositions propres et introspectives on comprend qu'il s'agit de donner de l'importance aux émotions et à l'écriture, d'interpeller. Cet EP éblouit par sa richesse et on ne peut qu'attendre impatiemment le futur album (Merci Ross Robinson). Le tout n'a rien à voir avec le souci de s'affranchir de groupes comme Aaron ou The Dresden Dolls. La voix claire a pris le large, perdue dans les vastes plaines de l'Alaska, dans les bois dans lesquels elle a mué. Le souffle de la civilisation est redevenu sauvage et indompté.

La seule barrière réside dans ce chant screamo a priori incompatible avec le sublime qui émane du duo instrumental. A priori seulement, car à y regarder de plus près ce chant vorace et féroce qui délivre ses peurs et déceptions pourrait être la bande-son de textes romantiques garants d'une littérature de l'âme. Les mots ne pouvaient donner qu'une peinture descriptive des tourments de l'homme et la détresse restait un cri qu'on ne pouvait qu'imaginer à la lecture. Le sublime et l'aura classique qui émanent de M.O.P.A affirment la légitimité du sentiment douloureux à être inscriptible sur tout support. Sur le CD, l'authentique parole torturée se libère dans un contexte intimiste et rassurant créé par le piano et ses compositions nettes et propres. Comme le pianiste Glenn Gould apportait un surplus délectable à la musique déjà parfaite de Bach avec une finesse saisissante, My Own Private Alaska réinvente le cabaret rock, loin des atours punk de The Dresden Dolls et du flux dominant. Le groupe se fait voix d'une littérature, d'une foi en l'expression telle qu'elle se ressent au fond de soi. Violente, la jalousie serre la gorge, la gonfle de souffrance, ce que Milka traduit parfaitement dans le choix d'un screamo qui balance entre les crescendo et decrescendo brutaux. La moindre parcelle de ses mots résonnent clairs et concis, Ego Zero Let's run away from me Don't come to me little princess Running away. Vous voilà avertis, la douleur a sorti ses griffes. Se tenir à l'écart et le clamer avec rage. I am an island, Everybody hurts and everybody cries – I am an island. It's not a song it's just fucking reality. Quelqu'un a le blues? Ce trio, oui, incontestablement, un blues romantique à la sauce hardcore. Trois âmes éviscérées.

Les non-amateurs de screamo regretteront le choix du trio pour la saturation vocale, mais à l'écoute des textes on comprend qu'il s'agit d'un choix cohérent avec l'art indicible de dire les souffrances, de décrire le gouffre et la mort: I am an island, Did you know a man killed his own family, If I don't kill myself, it's cause I've already left. Les complaintes de l'âme pourront en rebuter plus d'un, musique exutoire face à un symptôme bien connu des poètes. Le spleen et sa bile noire ne sont pas arrêtés avec Baudelaire. I am an Island débute en une fugue accélérée et puissante, le chant en crescendo est viscéralement éveillé. Il n'est plus maladif et mourant mais le cri d'un dernier coup de gueule à l'aide d'un piano en spirales et d'un mezzo renforcé d'a-coups brutaux donnés sur le clavier. A la fin du morceau on perçoit un growl de fond, puis des hurlements jusqu'à l'extinction.
Un piano animé par un air de fugue, une batterie en soutien, l'osmose, alors même si le chant brisé n'est pas forcément accessible, les cris de Milka sont parfaitement orchestrés et insérés intelligemment au sein de ce trio de feu. Il ne donne à aucun moment l'impression d'être un intrus. Bouillonnante et plaintive, la voix s'échelonne par dessus un piano incessant. Des trois instruments c'est celui qu'on retiendra en priorité devant une batterie souvent trop discrète excepté dans Page of a Dictionary dans lequel elle est en duo avec le chant, le piano s'arrêtant alors de jouer. Avec First step on retrouve le 7ème Art pour un morceau purgé de chanteur et une douce entrée en matière opérée par des notes espacées allant du mezzo nostalgique à des descentes plus enjouées dans un solo brillamment mené par T. Le piano est seul. My Own Private Alaska tire sa révérence en laissant une ballade instrumentale se charger des adieux et nous rappeler la beauté des paysages glacés.

Original, désespéré, en marge, M.O.P.A vide son sac avec talent. Certaines oreilles se révèleront attentives et réceptives d'abord charmées par le piano, fil conducteur qui transforme les plus sceptiques en grands attentifs, curieux, piqués soudainement à vif après avoir premièrement grimacé à l'écoute atypique du beau et du laid regroupés. Pour d'autres il faudra plusieurs écoutes avant de se laisser charmer par la bête. Après le choc de la première écoute la bizarrerie prend tout son sens. En concert, on comprend alors la mise en scène des trois musiciens. Three sitting guys, chacun voué à son instrument, chacun enrichissant l'autre de sa complainte propre. Un sublime enragé dont les trois niveaux d'interprétation nous entraînent dans les profondeurs déformantes et agitées de l'intime.


"Le lyrisme de la souffrance est un chant du sang, de la chair et des nerfs", Cioran dans Sur les cimes du désespoir.

Charlotte Noailles.

EDDIE VEDDER - "Into The Wild"



1. Setting Forth 2. No Ceiling 3. Far Behind 4. Rise 5. Long Nights 6. Tuolumne 7. Hard Sun 8. Society 9. The Wolf 10. End Of The Road 11. Guaranteed


Amis lecteurs bonjour !

Pour cette première chronique, je choisis de vous parler de la B.O du film "Into The Wild", de Sean Penn, signé par Monsieur Eddie Vedder, plus connu pour être la voix de Pearl Jam.

Pour ceux qui ont eu la chance de voir le film, vous avez déjà les paysages en tête. Pour les autres, pas de panique, Eddie y remédie très efficacement.

Cet album nous transporte en Amérique du nord, nous montrant plusieurs des magnifiques facettes de ce morceau de continent.

Certains morceaux sentent bon le chalet canadien, le feu de bois et la chemise à carreaux : Guaranteed, où la voix de Vedder nous embarque au fil des arpèges.

D'autres nous font planer au dessus des grandes étendues du Far West : Far Behind, Setting Forth, Hard Sun. Des morceaux puissants et lumineux, en contradiction avec des morceaux plus sombres, comme Long Nights ou The Wolf, où Eddie nous montre que lui aussi peut parler aux loups.

Sans oublier les deux petites perles où l'artiste troque sa guitare folk pour un ukulélé : No Ceiling et Rise.


Pour terminer, je vous garantis que cet album peut s'écouter à n'importe quel moment de la journée, de la semaine ou de l'année, et qu'en général, ça fait beaucoup de bien par où ça passe =).

Profitez bien des liens, et je vous encourage à acheter l'album ! (Ou même à courir voir le film si vous n'avez pas eu ce plaisir)

HECTIC PATTERNS - "Random"


1. Vaseline, 2. Asylum, 3. Macabre Punishment, 4. The Grand Hare Order, 5. Hyperborea, 6. I'll Quit Smoking Tomorrow, 7. Random, 8. Shiva, 9. Entreprise, 10. Thailand


Tu attends avec impatience le nouveau Martyr et pleures la dislocation de Gorguts ? Tu maudis ton pote qui t’as posé un lapin 3 jours avant de décoller pour le Hellfest alors que ce pèlerinage était prévu depuis de longs mois ? OK, sèche tes larmes petit et ressort ton piercing nasal, oncle Demis a de la came pour toi : Hectic Patterns déboule avec son premier album Random et derrière ces épitaphes peu explicites et un artwork douteux se masse en fait une des futures références hexagonales (voire au-delà) en termes de brutal death chirurgical…

En effet la prod’ de fou furieux sublime (enfin, façon de parler) la dextérité de chaque interprète. Ludo et François, gratteux de leur état, monstrueux, apparaissent même comme les plus communs, en dépit d’un jeu n’ayant rien à envier à Fredrick Thordendal (Meshuggah, …) & Co. C’est en fait à la rythmique que le tout s’avère le plus hallucinant : dans la tradition actuelle de la basse (enfin) audible, clinquante et virtuose, Nico excelle (« Asylum », l’entame d’ « Enterprise ») mais que dire de Greg, batteur boulimique de variations de tempi, impulsant nombre de polyrythmies et usant jusqu’à la moelle de sa multitude de toms et cymbales qui, ici, ne sont pas utilisé(e)s pour en mettre plein la vue sur les photos -rarement la China avait aussi bien sonnée. Au chant, James impose le respect, distillant pêche et puissance dans la plus pure tradition growlée, intégrant néanmoins quelques digressions éraillées bienvenues.

En outre, le combo pond des ogives à la pelle (« Vaseline », « The Grand Hare Order », « Asylum » et ses mosh parts cinglantes) anabolisées par une complexité et une déstructuration poussées (« Hyperborea »). Des titres aussi frappés que « Macabre Punishment » feraient même pâlir Beneath The Massacre…

Pour autant, la formation n’atteint pas la perfection, cantonnant ses rares incartades vers des paysages plus aérés et aventureux à de brèves intros et ne parvenant pas à façonner le relief nécessaire à une musique aux atours pourtant si riches d’influences. L’instrumental « I’ll Quit Smoking », trop peu habité, en est la plus pure illustration.

Il n’y a donc pas ici de soli lyriques et cristallins si bien mis en valeur par un groupe tel que Necrophagist ; pas d’emprunts « Cyniciens » comme chez les prometteurs The Faceless ; pas non plus d’expérimentations développées à un niveau assez confondant pour rappeler Pitbulls In The Nursery ; ni de tempérances folk comme chez les feu Nostromo.

Ce sont donc ces quelques réserves qui instituent une certaine linéarité à partir de la seconde moitié de la galette mais le feeling musical et la recherche en termes de songwriting -les textes de Caroline Delavault évoquant folie et persécutions professionnelles ne sont pas des plus enjoués mais voguent avec inspiration entre la radicalité de Benighted et la verve Brutal Truth- installent Hectic Patterns comme un sextet à l’avenir radieux.

DemisRoussos81